Ne sachant pas exactement où se trouvait la première école dans laquelle je devais me rendre et connaissant ma fâcheuse tendance à ne jamais être à l’heure (Big up à mon groupe, with love), je décide de m’y rendre bien plus tôt que prévu. 9h20, j’arrive avec 10 minutes d’avance à l’arrêt de tram situé à 100 mètres de l’école. Par chance, car, n’ayant aucun sens de l’orientation, je croise un passant qui, bien gentiment, me mène à destination. Lors de mon entrée dans l’école, je suis accueillie par une très charmante femme d’entretien qui me dirige vers la salle des professeurs. Voyant les minutes défiler, j’en viens à me demander si je ne me suis pas trompée de jour, ou pire, si je ne me suis pas trompée d’école. Quelques minutes plus tard, l’enseignante en DASPA arrive. Au fur et à mesure de mon entretien, je me rends compte que tout ce que j’ai pu lire dans la littérature sur le sujet ne se concrétise pas sur le terrain. Ces classes de primo-arrivants (telles qu’elles sont nommées par la plupart des professeurs que j’ai pu interroger) permettent bel et bien une intégration plus rapide des élèves dans leur environnement social et scolaire. Ils peuvent s’épanouir davantage, grâce à l’apprentissage du français. Fière du nouveau rôle de journaliste et chercheure que j’ai endossé durant une heure, je remercie mon interlocutrice et me dirige vers la deuxième école de la journée.
11 h 50, j’entre dans cet établissement de Saint-Josse-Ten-Noode et un badge de visiteur m’est remis à l’entrée. Une signature et une photocopie de ma carte d’identité plus tard, je me dirige vers la classe de ma seconde interlocutrice. Dans les couloirs, je croise le directeur de l’école qui, quelques jours plus tôt, me lança au téléphone un « Baslama, vous voyez, moi aussi je parle arabe ». Amusée et le sourire en coin, je le suis vers la classe de l’enseignante. Nous nous serrons la main et nous nous installons dans le fond de la classe, où se trouve une grande table et plusieurs chaises. Très joviale, elle répond à mes questions avec beaucoup d’entrain. A l’écoute de ses réponses, je me rends compte qu’elle apprécie énormément son travail et que ce rôle lui tient à cœur. Bien qu’elle ait été professeure de différentes classes d’enseignement général auparavant, elle a décidé, il y a quelques années, de se consacrer exclusivement à l’enseignement spécialisé des primo-arrivants. Mes impressions concernant l’intégration des élèves dans leur environnement se confirment. Selon ces professeurs, les DASPA ne sont que du positif, bien que la durée d’enseignement devrait être revue au cas par cas, selon leurs dires.
Entre cet entretien et le prochain – oui ce fut une longue, très longue, journée –, il m’est proposé d’assister à une heure de cours donnée au groupe « analphabète ». Je m’installe donc dans le fond de la classe, histoire de ne pas perturber le cours. L’enseignante est appelée dans le couloir et les élèves commencent à me parler, intrigués par ma présence. Ils me demandent de quelle origine je suis, je leur réponds que je suis algérienne. Une petite discussion en arabe se met en place et l’un d’eux me fait croire qu’il est de Sétif, en Algérie. Surprise, je lui demande comment il est arrivé en Belgique. Il me révèle ensuite qu’il est syrien et qu’il a rencontré des Algériens sur sa route vers l’Europe. Leçon 1 : Ou comment se faire berner par un enfant de 12 ans en 30 secondes. Le cours commence et plusieurs élèves se retournent, à tour de rôle, pour me sourire. Leur joie de vivre, malgré ce qu’ils ont bien pu voir ou vivre, me fait réaliser à quel point, en Europe, on a tendance à se soucier d’un rien, moi la première. Le cours se termine et je remercie l’enseignante qui m’a si gentiment accueilli. Les élèves me saluent tous d’un « au revoir, Madame » à tour de rôle.
La journée se termine par deux autres entretiens, tous deux aussi enrichissants que les premiers.
Bref, ce fut une longue MAIS très chouette journée.
#EnquêteursDeChoc
#OnYestArrivé
Sabrina Boukarfa.