« Quitter son pays, c’est tout plaquer. On ne sait pas pour combien de temps on part ou même si on y reviendra un jour », me dit très lucidement un travailleur de Convivial d’origine rwandaise.
Cet homme a quitté son pays à cause du génocide et vit depuis plus d’une dizaine d’années en Belgique. La société belge ne peut que se féliciter de success stories telles que la sienne : un immigré qui ne vit pas de subsides publics et qui a trouvé du travail ainsi qu’un logement. Elle ne peut qu’applaudir. Toutefois, derrière cette belle histoire se cachent de nombreux sacrifices et difficultés. En effet, immigrer dans un pays et y commencer une nouvelle vie a aussi un prix : le demandeur d’asile doit faire l’impasse sur sa culture et ses traditions, faire abstraction du passé et s’adapter aux nouvelles valeurs de son pays d’accueil. Une étape bien plus difficile qu’il n’y parait…
Ainsi, il m’explique, un sourire au coin des lèvres, qu’il ne savait pas comment cuisiner avant de venir. Au Rwanda, il occupait un poste au tribunal de la justice ; il faisait donc partie de la classe supérieure et avait des domestiques pour s’occuper des tâches ménagères. À son arrivée en Belgique, tout a été différent. Ce fait presque anodin reflète pourtant un problème bien plus grave. En effet, les personnes immigrées hautement qualifiées comme les médecins, vétérinaires, avocats ou ingénieurs doivent accepter ici des postes bien moins prestigieux (cueilleur de tomates, chauffeur de voitures, etc.) faute d’équivalence de diplômes. L’intégration par le travail n’est donc pas toujours chose aisée, et prend du temps et de la patience.
Quelques semaines plus tard, je rencontre un autre travailleur rwandais chez Convivial. Il me raconte une anecdote tout à fait étonnante. Pendant ses cours d’intégration, des étudiants sont venus lui parler de la cohabitation. Cette notion lui était complètement étrangère. Il m’a d’ailleurs avoué que cela n’existait pas dans son pays et que les gens qui agiraient de la sorte seraient pointés du doigt. Sur sa lancée, il me confie qu’au début, il ne savait pas comment commander aux restaurants. Tous ces nouveaux noms de plats étaient difficiles à prononcer voire mémoriser. Par conséquent, il restait chez lui et mangeait ce qu’il connaissait.
Si l’on y ajoute un zeste de difficulté de compréhension de la langue, une poignée de préjugés et une pincée d’appréhension, voire de regrets, le cocktail risque de devenir dur à avaler pour certains d’entre eux. Cela dit, ils vous diront tous qu’ils ont trouvé la recette du bonheur en Belgique.
Floriane Rocrelle
Bibliographie : France-Info, « UNHCR ACCUSED OF ABANDONING RWANDAN REFUGEES », 20 janiver 2012, https://www.google.be/search?q=google+image&biw=1600&bih=799&source=lnms&tbm=isch&sa=X&ved=0ahUKEwiE9Z_rgaDMAhUKORQKHUYUCtQQ_AUIBigB#tbm=isch&q=rwandan+refugees&imgrc=9o6RoGak-_j7cM%3A