Grâce aux interviews réalisées, j’ai pu constater que l’interaction avec les émigrés italiens en Belgique a enrichi non seulement ma capacité à appliquer des méthodes de recherche sociale, mais m’a aussi apporté une compréhension plus profonde du phénomène migratoire.
La proportion de la communauté italienne en Belgique est assez difficile à estimer car les sources statistiques à disposition sont celles fournies par l’institution AIRE (Anagrafe Italiani Residenti all’Estero), qui n’est pas en mesure de contrôler l’ensemble du flux migratoire italien. Toutefois, en observant le recensement de l’AIRE de 2012, nous pouvons observer que la Belgique est aujourd’hui le sixième pays au monde à accueillir le plus grand nombre d’expatriés italiens. Selon ces statistiques, 290.000 d’entre eux vivraient en Belgique. Compte tenu de ce chiffre, je me suis posé la question si cette communauté s’y était bien intégrée.
La première vague migratoire des années cinquante et soixante a contribué au développement économique de la Belgique. Ce premier mouvement migratoire comprenait surtout des hommes qui quittaient l’Italie pour venir travailler dans les mines de charbon. Cette première vague était souvent caractérisée par un niveau d’instruction et un effort linguistique très bas. Cette génération a donc eu de nombreux problèmes à s’intégrer avec les Belges et les relations avec les pays d’origine étaient très vives. Cela reflétait l’espoir des Italiens de retourner dans leur pays après plusieurs années de travail en Belgique.
En revanche, j’ai pu noter que les générations suivantes se caractérisent par un bon niveau d’instruction et une meilleure connaissance du néerlandais et du français. Je parle ici des enfants des Italiens de la première génération qui se sont parfaitement intégrés en Belgique et dont les liens avec leur pays d’origine se sont considérablement affaiblis.
Une autre réalité migratoire émerge aujourd’hui : celle liée aux institutions internationales, et surtout européennes ainsi qu’aux professions intellectuelles. Cette nouvelle génération de fonctionnaires, de stagiaires, employés et autres lance une nouvelle réflexion sur les différentes manières d’être Italien à l’étranger.
Enfin, j’ai remarqué que les Italiens que j’ai interrogés à Bruxelles ne critiquaient pas l’immigration en tant que phénomène, mais qu’ils s’opposaient aux politiques migratoires mises en œuvre par l’Union européenne.
Vittorio Russo