C’est un fait : la crise migratoire ne peut être niée et ne peut passer inaperçue. Les médias comme la télévision continuent dans leur lancée d’images les plus provocantes tandis que les journaux baignent dans les gros titres. L’opinion publique est touchée. Mais comment savoir ce que la population pense réellement ? C’est à partir de cette question qu’a débuté notre étude sur la perception de la crise migratoire à Bruxelles.
L’entretien collectif, ou encore focus group, semblait être la méthode idéale et, avec du recul, je ne peux que constater que l’intuition de départ était la bonne. En effet, d’une part, l’avantage de l’entretien de groupe est qu’il reflète une petite partie de la société[1]. Là est notre but. D’autre part, l’intérêt de la méthode pour analyser au plus près l’impression générale des individus face à la crise migratoire réside dans le fait de sa naturalité[2].
Cette naturalité que j’ai retrouvée lors de l’entretien francophone s’est exprimée par l’hétérogénéité du groupe. Nous avions au préalable déterminé une tranche d’âge (les 18 – 30 ans), mais nous voulions surtout une totale diversité des participants au niveau socio-professionnel. Plus les écarts seraient grands, me semblait-il, plus la discussion se ferait et enclencherait une certaine dynamique. Ma seule crainte était toutefois qu’un individu n’engloutisse les autres.
Ne sachant jamais avec qui nous allions nous retrouver, il était difficile d’appréhender la discussion. Par quel biais rendre intéressant le débat afin qu’il touche chacun, sans savoir à l’avance leurs connaissances sur le sujet ? Comment les attirer et les garder concentrés ? Une bonne ambiance générale est primordiale pour que la conversation perdure. Cela m’a surprise : la discussion s’est faite naturellement, sans artifice. Il était presque difficile de ne pas interagir. Parfois l’envie me prenait d’essayer de reformuler les dires de certains afin que d’autres, dans l’incompréhension, comprennent et ne restent pas sur un malentendu. En expliquant certains détails, tous ont pu être au même niveau de compréhension et continuer, sûrement plus à l’aise, le débat. Par exemple, la chaîne de télévision Arte propose sur son site web un lexique au titre « Réfugié, migrant, asile… de quoi parle-t-on ? », que nous avons soigneusement montré au tout début aux participants, après qu’ils aient eux-mêmes proposés leurs définitions de ces mots. Cela a permis à tous de savoir exactement de quoi l’on parlait, sans plus aucune ambiguïté.
Il y a très certainement des défauts à prendre en compte dans quelques-unes de mes prises de décision et dans mon attitude durant l’entretien collectif. Ce n’est que l’expérience qui permettra de les effacer prochainement.
Marion Kammler
[1] L’enquête et ses méthodes. L’entretien collectif. Sophie Duchesne et Florence Haegel, Nathan, coll. « 128 », 2004, 128 p.
[2] Ibid