Un réfugié sur mon divan ?

« Une inscription en ligne. Un coup de fil. Quelqu’un toque à notre porte. J’ouvre. Un petit groupe de trois personnes est sur le seuil : un interprète flanqué de deux réfugiés. Je les fais entrer. L’interprète me met au parfum avant de s’évanouir dans la nuit tombante… » L’histoire commence là.

Début février 2016, notre groupe d’étudiants de l’ULB a décidé de partir à la rencontre des citoyens qui ont ouvert leurs portes aux réfugiés. Le but de notre enquête ? Comprendre ce qui a pu pousser des personnes à accueillir des inconnus dans leurs foyers pour une nuit, une semaine, voire une vie. Nous avons voulu comprendre qui ils sont et expliquer leur geste.

A l’été 2015, l’Europe fait face à un afflux massif de migrants. Une conséquence des conflits qui déchirent le Moyen-Orient.

Au début de l’automne, ces voyageurs qui ont bravés mille et une épreuves s’entassent dans le parc Maximilien, à Bruxelles, face à l’Office des étrangers – l’organe qui décide s’ils auront accès au statut de réfugié. Dans ce chaos général, émerge une initiative, placer les migrants laissés sur le carreau par manque de lits dans des familles d’accueil. Nous sommes entré en contact avec Marine, l’une des étudiantes de « ULB with refugees », une association d’étudiant qui s’est mobilisée pour placer les migrants dans des familles bruxelloises. L’association a lancé un appel sur internet. Les familles désireuses d’accueillir un migrant s’inscrivaient en ligne sur un listing. « ULB with refugees » se chargeait ensuite d’accompagner le migrant dans la famille avec l’aide d’un interprète. Cette rencontre avec Marine fût bénéfique pour notre travail car elle nous mis en relation avec les familles d’accueils. Rapidement, nous entrons tout les cinq en contact avec ces familles. Au début, nous essuyons quelques refus. La plupart du temps les gens ne peuvent pas nous répondre pour la simple raison qu’ils n’ont finalement accueillis aucun migrants. La plateforme a eu tellement de propositions que toutes n’ont pu être satisfaites.

Pour mener à bien notre travail, nous avons décidé de réaliser des entretiens semi directifs. Nous nous sommes focalisés sur les dix-neuf communes de Bruxelles. Nous avons intitulé notre problématique comme suit : « Dans quelle mesure des sources de motivations communes peuvent être dégagées d’un acte de solidarité ? L’accueil des migrants à domicile par des citoyens bruxellois ».

Nos guides d’entretiens sous le bras, nous débutons notre enquête. Rapidement un début de profil émerge. Bien sur à ce stade, aucune conclusion générale ne peut être tirée. D’ailleurs, notre petite dizaine d’entretiens ne nous permettra pas de tirer une quelconque analyse empirico-scientifique valable. Cependant, il est intéressant de constater que la quasi totalité des personnes que nous avons rencontrées travaillent soit dans le secteur associatifs soit au sein des institutions européennes. Elles font partie de la classe moyenne, pratiquement toutes possèdent leurs propres maison. Ces personnes ont eu la possibilité d’accueillir car certains critères étaient remplis : une chambre libre et de la disponibilité en terme de temps. En général, les interviewés étaient relativement bien informés de la situation des migrants en Belgique. Ils n’ont pas appris grand chose de plus sur la problématique via leur rôle de famille d’accueil. Il est également intéressant de remarquer que les séjours furent, pour la plupart, d’une très courte durée une nuit voire deux, maximum. Cela n’a pas toujours permis de tisser des liens sur le long terme. A ce jour, la majeure partie des familles d’accueils n’est plus en contact avec les migrants accueillis. Les personnes font état de rencontres fugaces qui n’ont souvent durée que le temps d’un diner. En effet, pour la plupart, les demandeurs d’asiles arrivèrent le soir et repartirent dès le potron-minet, vers cinq heures du matin, pour aller faire la file devant l’Office des étrangers. Ces voyageurs, issus d’Iraq, de Syrie, d’Afghanistan ou de Palestine, proviennent tous de pays ravagés par la guerre où « rester » ne relevait plus du possible.

Ces rencontres nous ont permis d’accéder à une réalité souvent méconnue. Ces hommes et ces femmes nous ont montré ce qu’ils étaient capables d’offrir, eux « petits citoyens pas spécialement très, très audacieux », pour reprendre l’expression de Véronique, une maman d’accueil que nous avons croisée. Tous, en dévoilant leur histoire autour d’eux, ont permis de faire (un peu) changer les mentalités. Telle une tache d’huile qui se répand, certains ont pu montrer à leur entourage que les migrants n’étaient pas (tous) des brigands avec un grand couteau entre les dents. Nous avons pu observer un versant positif et humaniste de cette tragique crise migratoire qui frappe l’Europe aujourd’hui.

Alejandra Arteaga, Laetitia Coucke, Carline Martinez, Robin Van Leeckwyck.